Annoncer le divorce aux enfants

Voilà les enfants, c’est fini…

On a beau chercher les mots, le meilleur moment, une séparation est difficile à annoncer à ses enfants. Dire les choses simplement, les rassurer, être à leur écoute, les aide à surmonter les événements.

Quand les parents décident de prendre chacun de leur côté un autre chemin, ils ne perçoivent pas toujours ce que vivent et ressentent leurs enfants. Devant une nouvelle réalité, les plus jeunes comme les ados vont amortir le choc si leur environnement et leurs repères restent stables.

Mettre un point final à une histoire commune est douloureux. Il traduit un échec, la désillusion d’un idéal.

« Selon l’importance de la relation, de l’image qu’ils avaient de la famille, les parents sont pris dans des enjeux à la fois matériels, affectifs, voire existentiels, observe Anne de Montmollin, directrice adjointe de la fondation As’trame . Dans leurs questionnements d’adultes, ils n’imaginent pas forcément ce qui se passe dans la tête de l’enfant. » 

Signe des temps, près d’un mariage sur deux finit par un divorce.

On peut se dire que du point de vue statistique, une séparation est devenue une étape quasi ordinaire dans le parcours amoureux de l’homme et de la femme modernes. Et que dans leur entourage, les enfants de divorcés ne sont plus des spécimens rares comme il y a quelques décennies.

« Ça leur fait une belle jambe de savoir que le divorce se banalise, réagit Nahum Frenck, thérapeute de famille, à Lausanne. L’enfant est l’union de deux êtres, il a une double appartenance et va ressentir la séparation comme une déchirure. »

Défaire le fil qui unissait la famille sans provoquer un trop grand chagrin est un exercice délicat. Dans l’intérêt de l’enfant, les parents doivent se mettre d’accord sur l’organisation pratique de sa future vie, ce qui va changer ou pas pour lui, dans son quotidien.

 

Clap de fin et séparation

Le temps ne fait rien à l’affaire. Si l’issue de la relation ne fait plus aucun doute, la séparation au contraire, a le mérite de clarifier la situation et de soulager les tensions.

« Quand la décision est prise et qu’elle va devenir effective, c’est le moment pour l’annoncer, juge Sylvia Thodé, thérapeute, conseillère conjugale et co-animatrice du groupe de parole pour enfants à l’OPCCF**, à Genève. Selon l’âge, il faut le dire avec des mots appropriés et indiquer dans quelle direction on va. »

Communiquer devient urgent d’autant plus que parents et enfants n’en sont pas au même stade dans cette crise parentale.

« Pour les adultes, informer de la séparation est un pas supplémentaire dans un processus déjà en cours et réfléchi, souligne Mme de Montmollin. Tandis que pour les enfants, le vécu est très différent. »

Même s’ils sentent les choses, qu’ils en ont marre eux aussi des nombreuses disputes qui détériorent l’ambiance, voir le modèle familial s’écrouler peut malgré tout les déstabiliser. Ils ont besoin d’une mise au point et de repères sur lesquels s’appuyer. « L’école, le sport, les copains sont aussi là pour les soutenir dans cette épreuve », considère M.Frenck. Sans cacher la vérité mais sans trop rentrer dans les détails non plus, les parents vont exposer à l’enfant, les répercussions concrètes qui le concernent.

 

Décision et réactions suite à l'annonce de la séparation des parents

« Papa et maman vont se séparer. D’ici un mois, papa va déménager mais toi, tu vas rester ici et tu iras toujours à la même école, à la même garderie… »

Pour leur donner toutes les chances de digérer la nouvelle, les parents n’ont pas d’autre choix que de parler sans détour à leurs enfants. Il faut être clair, simple et précis, ne pas jouer avec les mots, ne pas les surcharger d’infos quitte à en reparler plus tard.
Parfois, les parents aimeraient faire court et vite passer à autre chose. Pour l’enfant, ce moment est un carrefour entre deux vies, la première pierre de la reconstruction. Il peut se sentir coupé en deux et avoir du mal à continuer comme si de rien n’était. L’important, c’est que l’enfant sache que même si le couple traverse des problèmes, ses parents seront tout le temps là pour lui.

 « L’idéal est d’échanger ensemble, parents et enfants, sur la suite à venir, estime Mme Thodé. Si dépasser le conflit et les émotions demande trop d’efforts, chacun des parents le fera de son côté mais à condition de rester neutre et de ne pas critiquer l’autre »

Une fois esquissés les contours d’une coparentalité à instaurer, les parents seront attentifs à d’éventuels changements d’humeur ou de comportement qui peuvent apparaître juste après ou plus tard dans le temps.

 

Des mots et des dessins autour de la séparation des parents

La fondation As’trame a conçu une brochure qui parle du vécu des enfants lors d’un divorce. Destinée aux adultes, les difficultés les plus fréquentes y sont Illustrées par des dessins presque enfantins.

En plus de l’annonce de la séparation, de la perte des repères, d’autres risques sont évoqués comme l’enfant qui console ses parents, l’enfant messager, ou l’enfant pris dans un conflit de loyauté.

« C’est difficile de se mettre au niveau des enfants, note Mme de Montmollin. La fondation, fort de son expérience de plus de dix ans avec des enfants vivant la séparation, donne à travers la brochure, des explications et des pistes de réflexion. » Des groupes de soutien ont également été créés en 2001 pour permettre aux enfants d’échanger entre eux.

C’est le cas aussi à l’OPCCF à Genève, où des groupes de parole réunissent cinq mercredis de suite, des enfants de 4 à 12 ans.
« Ils ne se connaissent pas mais la glace est très vite rompue lors de première séance, assure Mme Thodé. Les enfants s’aperçoivent qu’il y en a d’autres comme eux dans le même cas. » En partageant des histoires qui leur rappellent des souvenirs personnels, en dessinant, en coloriant, ils font ressortir toutes les nuances de leurs émotions. On y trouve mêlés, de la tristesse, de la colère mais aussi du soulagement, de la joie. Cela peut aider les parents à mieux comprendre le fonctionnement de l’enfant et à déculpabiliser.

« Il faut écouter les enfants, leur poser des questions pour savoir comment ils vivent la situation, mais ne pas se focaliser uniquement sur le traumatisme de la séparation, conseille M.Frenck. En leur demandant des nouvelles de l’école, de leurs activités, du reste de la famille, on a une idée plus large de leurs sentiments. »

Il n’y a pas de moment parfait pour faire savoir à ses enfants qu’on se sépare. Le désir de leur épargner toute souffrance ne doit pas laisser planer de doute pour autant. Sinon les enfants pourraient espérer secrètement voir leurs parents se remettre un jour ensemble.

En même temps que le deuil de leur couple, les parents conscients des enjeux et des besoins de l’enfant, construiront les bonnes conditions de son développement. En toute occasion, ils répondront présents car ils savent que quoi qu'il arrive, on ne divorce jamais de ses enfants.

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